Comment TSMC est devenu un bastion pour Taïwan
Quand on parle de TSMC, on évoque souvent une entreprise qui joue un rôle clé dans la souveraineté de Taïwan. Non seulement elle contribue fortement à l’économie locale, mais elle est également perçue comme un rempart face aux ambitions chinoises. Cependant, avec les tensions internationales croissantes et le manque de ressources sur l’île, TSMC a décidé de mettre les bouchées doubles en lançant un plan d’expansion audacieux à l’échelle mondiale.
Depuis sa création, Taïwan a dû faire face à la menace d’une invasion par la Chine. C’est dans ce contexte que l’île a mis en place une stratégie de défense baptisée le « bouclier de silicium », un concept fascinant qui met en lumière l’importance vitale de l’industrie taïwanaise dans des secteurs clés comme les semiconducteurs.
Un acteur incontournable dans l’industrie
TSMC est sans conteste l’élément central de cette réussite. Fondée par Morris Chang, l’entreprise a révolutionné l’industrie des semiconducteurs en offrant une alternative low-cost et de qualité aux grands fabricants comme AMD et Texas Instruments. Depuis 1987, TSMC a su supplanter de nombreux concurrents et s’est établi comme un pilier dans un écosystème industriel taïwanais puissant.
En effet, The Economist affirme que deux tiers des chips produits dans le monde sont désormais fabriqués par TSMC, célébrée pour fabriquer 90% des puces présentes dans des технологiquement avancés produits comme les smartphones et ordinateurs portables.
Ajoutons à cela que l’entreprise joue un rôle clé dans l’essor de l’intelligence artificielle, cultivant une large part de ses activités dans des microprocesseurs essentiels, appelés « accelerators ». En fait, le chiffre d’affaires de TSMC a explosé, passant de 24 milliards en 2014 à un impressionnant 88 milliards en 2024.
Les défis de l’insularité
Cependant, la période de crise liée à la Covid-19 a fortement impacté l’entreprise, non seulement à cause des restrictions, mais aussi grâce à une prise de conscience mondiale de la dépendance américaine vis-à-vis des semiconducteurs taïwanais. Cela a conduit TSMC à changer de cap, en lançant un programme ambitieux d’expansion internationale d’une valeur de 190 milliards de dollars depuis 2020.
Bien qu’il soit étonnant qu’une telle entreprise, au cœur d’une économie mondiale, ait besoin de diversifier sa production, des pressions extérieures et une croissance de sa consommation d’électricité sur le sol taïwanais soulèvent d’importantes questions. Selon les estimations d’S&P Global mentionnées par The Economist, TSMC pourrait représenter jusqu’à 25 % de la consommation d’électricité sur l’île d’ici 2030.
Ajoutez à cela le problème démographique, avec un faible taux de natalité et une immigration quasi inexistante limitant le développement de profils techniques indispensables au bon fonctionnement des fonderies. Taïwan, qui n’a que 35 980 km², doit également composer avec son statut de densément peuplé, rendant difficile l’établissement de nouvelles infrastructures nécessaires pour les usines géantes requises par TSMC.
Un futur rayonnant, mais délicat
Pour compenser ces faiblesses, TSMC n’hésite pas à investir dans ses usines à l’étranger. Historiquement, ces derniers fabriquaient des chips moins avancés, mais cela change. L’Arizona, par exemple, va bientôt accueillir six usines ultra-modernes, avec un budget d’investissement colossal qui est passé de 12 milliards de dollars à 165 milliards au fil des années.
Parallèlement, des usines de plus petite taille voient également le jour au Japon et en Allemagne. Cependant, ces efforts d’expansion ne sont pas sans risque. La main-d’œuvre y est plus coûteuse et bien souvent moins efficace, ce qui engendre de nouvelles problématiques.
Un équilibre précaire à tenir
TSMC court donc un véritable risque avec sa stratégie d’internationalisation : demander si ce « bouclier de silicium » ne s’effondrerait pas au final. Tant que la Chine dépend des produits TSMC, l’île pourrait rester en sécurité. Mais récemment, les États-Unis ont émis des interdictions limitant les exports de certaines puces vers les clients chinois, remettant en question cette hypothèse.
L’entreprise doit ainsi jongler entre diversifications de ses usines tout en gardant une stature prépondérante dans le secteur pour dissuader tout acte agressif de la Chine. C’est une mission délicate, mais si TSMC arrive à relever ce défi, il pourrait bien assurer l’avenir de cet élément fondamental de l’économie mondiale.
L’article a été à l’origine publié le 27 août.
